Edicter que la ville rose est une gourmande d'élite n'étonnera personne. Même si depuis le retrait de Lucien Vanel, elle se cherche un leader charismatique. La grande table de la ville? Les Jardins de l'Opéra, en retrait du Capitole, à côté du plus bel hôtel de la cité. Le discret Dominique Toulousy pratique un classicisme renouvelé dans un cadre grand-style. Quelques exemples de son talent? La gelée d'huîtres à la crème d'asperges, la salade de palombe aux cèpes, le bar croustillant au tian de langoustine, les queue et joue de boeuf en parmentier à la truffe, plat "vanelien", le pigeon pané aux épices, le vrai mille feuille à la vanille ou l'indulgent au café et à la réglisse à l'anis étoilé. Autant de mets qui assurent le sans-faute, même si, ça et là, un coup de folie, voire un doigt de personnalité en sus, manquent à son registre.

 

Juste derrière, Michel Sarran et Gérard Guarrigues jouent les lieutenants de charme. Le premier pratique une cuisine méditerrannéenne sophistiquée dans une demeure à l'italienne : risotto glacé au caviar et grenouilles, soupe tiède de foie gras à l'huître, loup cuit-cru au chorizo et crème moutardée au pistou, agneau de lait aux trois façons (dont un splendide canneloni à la daube).

Le second, à l'enseigne du Pastel, dans une demeure bricolée à l'écart du centre, joue le sud-ouest rédéfini, rappelant qu'il fut le lieutenant de Dutournier au Carré des Feuillants. Ses saint-jacques en coque, rôtie à la moëlle et à l'ail frit, son risotto d'orge perlé flanquant des joues de raie au citron confit, le gigot d'agneau en croûte au jus de truffe, le sorbet potiron et vieux rhum ont de l'allure, voire du caractère.

L'outsider ? Benoît Cantalloube, formé chez Guérard, Boulud à New-York, Savoy à Paris, qui cuisine comme l'oiseau chante. Sa maison de pays, au pied de la basilique du même nom, a du charme. Et tout ce qu'il mitonne (haricots tarbais aux grenouilles et petits gris façon cassoulet moderne, saint-pierre aux artichauts et pignons au Noilly, pigeon aux lentilles vertes, joli granité aux fruits et fromage blanc) est digne de grand intérêt.
On n'oubliera pas de citer, au registre des nouveautés, l'arrivée de Jacques Depeyre, venu de Montauban, dans la discrétion d'une maison en lisière, ni de Pierre Roudgé (la Belle Epoque, le Cercle d'Or) dans la Brasserie du Stade, version new-look (épatante terrine de morue aux cèpes), ni de Philippe Puel qui joue la modestie bon enfant au Cantou, près de l'aéroport.

La révélation ? Il faudra aller jusqu'à Colomiers. L'Amphytrion est une demeure au chic champêtre sur le mode contemporain. La jolie Sandrine Batard vante avec grâce la cuisine agile de Yannick Delpech qui, à 23 ans, a dix ans d'expérience, notamment chez l'expert chocolatier Belin à Albi, Oudill à Biarritz, Pélissou au Gindreau de Saint-Médard-Catus. Son foie gras mi-cuit au madiran avec son pain craquant, son tartare de canard, ses saint-jacques en coque au riz des Andes, son pageot à la fleur de sel et son admirable pied de porc en crépine avec couennes confites au vin rouge font figure de divines surprises. Ses jolis desserts chocolatés (moëlleux à l'orange, chaud-froid à la vanille) sont dignes d'un maestro du genre.

Gilles Pudlowski

Les adresses
de la semaine

Les Jardins de l'Opéra
1, pl. du Capitole.
05 61 23 07 76.
Menus : 220 (déj.), 300, 540F.

Michel Sarran
21, bd Armand Duportal.
05 61 12 32 32.
Menus : 240 (vin et café c.), 500 (vin et café c.)F.

Le Pastel
237, rte de Saint-Simon.
05 62 87 84 30.
Menus : 170 (déj.), 230, 300, 380F.

7, place Saint-Sernin
7, pl. Saint-Sernin.
05 62 30 05 30.
Menus : 95 (déj.), 140-190F

Depeyre
17, rte de Revel.
05 61 20 26 56.
Menus : 170, 220, 270, 320F.

Brasserie du Stade
114, rue des Troënes.
05 62 72 38 36.
Carte : 150-200F.

Le Cantou
98, rue Velasquez, St-Martin-du-Touch.
05 61 49 20 21.
Menus : 98 (déj.), 165, 210, 320F.

L'Amphytrion
chemin de Gramont, Colomiers.
05 6115 55 55.
Menus : 145-240F.